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Une redingote oubliée au Chesnay ? Une légende bien tenace

Napoléon, après sa défaite à Waterloo et sa deuxième abdication, s’est-il arrêté au Chesnay ? Cette question est suggérée par la légende, tenace, qui voudrait qu’il ait oublié sa redingote grise dans une maison au niveau du carrefour actuel qui en porte le nom. Les légendes ont la vie dure, même quand elles ne reposent sur aucune base solide… Et celle-ci ?

Le parcours historique connu après Waterloo

Reprenons l’Histoire telle qu’elle est connue et établie. Le 18 juin 1815, la défaite de Napoléon à Waterloo sonnait la fin de l’épopée napoléonienne des Cent Jours, commencée le 1er mars de la même année avec le débarquement de l’Empereur déchu à Golfe Juan après un peu moins d’un an passé sur l’île d’Elbe.

Rentré à Paris le 20 juin, Napoléon y fut désavoué par le Parlement, abdiqua pour la seconde fois le 22 et partit pour la Malmaison où il attendit un éventuel retournement de situation. Il reçut un sauf-conduit pour se rendre à Rochefort afin d’embarquer vers les États-Unis, sauf-conduit qui s’avéra ensuite une manœuvre vers Plymouth, puis l’exil à Sainte-Hélène.

L’urgence de fuir vers Rochefort

Le 29 juin, alors que les forces coalisées approchent de Versailles, Napoléon prend la route vers Rambouillet vers 17h. Il voyage vêtu d’un frac marron, selon Madame de Montholon. Il est donc hautement improbable qu’il ait porté sa célèbre redingote grise ce jour-là, ce qui rend la légende locale immédiatement suspecte.

Le passage par Rocquencourt ne signifie pas passage au Chesnay

Il est vrai que l’Empereur passa par Rocquencourt et Saint-Cyr. Mais depuis la route de Rueil, il a très probablement emprunté la route de Saint-Germain, puis traversé le parc du château de Versailles pour éviter le bourg de Versailles. L’idée d’un crochet par le Chesnay ne tient pas : à l’époque, la seule voie possible (rue Jean-Louis Forain actuelle) n’était qu’un sentier de terre non carrossable. La future rue Pottier, elle aussi non praticable, n’aurait pas permis une jonction vers le carrefour des Petites Maisons.

Pourquoi éviter Versailles ?

L’Empereur évite Versailles pour des raisons politiques et militaires. Ville monarchiste, Versailles aurait pu réagir violemment à sa présence. De plus, les éclaireurs prussiens avaient déjà été repérés dans les environs. Le parc du château offrait une voie sûre et discrète.

Une légende née d’un commerce et du contexte politique local

Alors, d’où vient la légende ? Du restaurant « À la redingote grise », ouvert au début du XXe siècle à l’emplacement du carrefour actuel. Un fronton représentait la fameuse redingote, et l’établissement jouait sur la vague de bonapartisme qui parcourait alors Le Chesnay, notamment avec la redécouverte de la bataille de Rocquencourt, présentée comme la dernière victoire de l’Empire. Le quartier reçut d’ailleurs plusieurs noms de rues rendant hommage aux gloires impériales.

Une légende utile pour notre mémoire collective

La légende est donc une création locale, probablement pour attirer l’attention ou flatter l’identité bonapartiste du quartier face à la monarchiste Versailles. Mais cela ne la rend pas inutile.

Comme toute légende, elle dit quelque chose de notre mémoire, de nos envies de grandeur, de nos attachements symboliques.

Conclusion : une redingote imaginaire, un symbole bien réel

Aujourd’hui, le nom du carrefour de la Redingote garde cette mémoire collective. Même si aucun document historique ne vient la confirmer, cette anecdote raconte une part de l’esprit chesnaysien du début du XXe siècle.

Et pour voir une véritable redingote grise de Napoléon, direction le Musée de l’Armée à Paris, où une authentique est conservée.